Pour limiter le réchauffement climatique, la France doit considérablement réduire ses émissions de gaz à effet de serre dans les trente ans à venir. Jusqu’à atteindre la neutralité carbone. Cela va impliquer de changer nos modes de vie. Pour préfigurer les efforts de tous les acteurs, industriels, citoyens et pouvoirs publics, EpE a piloté l’étude ZEN2050 (Zéro Emission Nette de carbone), disponible sur son site. Tous les secteurs doivent revoir leurs pratiques : alimentation, habitat, mobilité, tourisme, publicité… Il est aussi essentiel que les acteurs agissent de manière concertée et cohérente. Le Jeudi 29 août 2019, WE Demain a organisé avec EpE une conférence-débat pour cerner quels sont les efforts que chacun envisage d’accomplir. Nous nous faisons l’écho ici des interventions de Ronan Dantec, Sénateur de la Loire-Atlantique, Vice-Président de la commission aménagement des territoires et développement durable, Laurence Pessez, directrice de la responsabilité sociétale et environnementale de BNP Paribas et Jean-Marc Barr, acteur, réalisateur et photographe.
Le sénateur de Loire-Atlantique, Ronan Dantec se présente comme un écologiste du courant « réaliste pragmatique ».« Nous vivons dans une époque pleine de tensions, de paradoxes, indique-t-il. Les deux années qui ont suivi la COP 21, les émissions de CO2ont augmentées en France. Il faut prendre conscience des mesures à prendre nationalement pour diminuer nos émissions de 1% et ainsi crédibiliser notre implication dans l’accord de Paris.Emmanuel Macron a des discours forts et montre un leadership diplomatique sur les questions environnementales mais aucune politique publique pertinente n’est mise en place. Il n’y a pas non plus de contrat social dans les solutions proposées (cf. Gilets Jaunes et taxe carbone) ». Pour Ronan Dantec, la redistribution via une fiscalité écologique pourrait assurer le contrat social nécessaire pour avancer dans la transition.
Ronan Dantec regrette que l’étude ZEN2050 ne fasse aucune recommandation le secteur aérien qui est pourtant très polluant. Il faut se concentrer sur des priorités comme l’isolation des logements (au lieu de crisper les citoyens sur la consommation de viande rouge). Il faut aussi faire la chasse aux incohérences. On peut s’étonner par exemple que pour les agriculteurs, le remboursement de leurs pertes liées aux sécheresses par les assureurs devient la norme. Au point que le second pilier de la Politique Agricole Commune (PAC) soit dédié à subventionner les assureurs au lieu de financer un changement de modèle agricole. C’est une aberration.
Pour Laurence Pessez (RSE chez BNP Paribas),« les entreprises ont pris conscience des enjeux environnementaux à la COP 21 en 2015. En tant que banque, BNP Paribas accompagne les entreprises dans leur transition. Son PDG est désormais président d’Entreprises pour l’environnement (EpE).
Il est nécessaire de changer la représentation de ce qui est désirable (cf. pubs sur les SUV qui sont totalement aberrantes). Il est aussi très important de mettre en place un enseignement sur les enjeux environnementaux dès le plus jeune âge.
L’évolution des entreprises est alimentée par la pression des consommateurs et de leurs nouvelles valeurs. L’économie d’usage au lieu de la possession, l’économie circulaire plutôt que linéaire. Le boycott ne fait pas peur aux grands groupes, car ils agissent à l‘échelle internationale. En revanche ils tiennent beaucoup à leur image et c’est ce qu’ils veulent protéger.
BNP Paribas finance la recherche de ressources pétrolières mais pas celle de gaz de schiste qui est plus couteuse et plus polluante.
L’intervention de Jean-Marc Barr, citoyen franco-américain, témoigne du désarroi des gens face aux nouvelles de plus en plus alarmistes. « On a l’impression que ‘le Capital’ prend toutes les décisions. De ce fait, je me sensresponsabilisé de ma citoyenneté, je ne peux pas agir en accord avec ma conscience », confie-t-il. « Chaque matin quand je lis les actualités sur le climat c’est un cauchemar que je compare avec des nouvelles de guerre ». En fait, beaucoup de citoyens ferment les yeux devant les faits. « On est comme dans le bunker d’Hitler avant que les russes n’arrivent. »
Les participants s’accordent à dire qu’il faut tout reprendre à zéro. Presque comme s’il fallait réapprendre à vivre. Totalement. Un peu comme le décrit Jose Saramago dans son livre L’aveuglement(1995) où une épidémie de cécité oblige chacun à explorer le monde, à tâtons…