Le décryptage des gènes responsables de maladies se fait désormais à marche forcée. Des investissements massifs (1/3 pivés/ 2/3 Etat) qui vont déboucher sur des casse-têtes juridiques : qui va controler ces données et leur accès ?
670 millions d'euros. Tel est l’investissement qu’a annoncé, ce 22 juin 2016, laministre de la Santé Marisol Touraine, afin de créer 12 centres pour décrypter la totalité des gènes des malades en France. Cette perspective s’inscrit dans le cadre
du plan «médecine personnalisée». Pour réagir au « retard accumulé par le pays ces dernières années »,cette mobilisation vise à faire « 10 fois plus de séquençages haut débit de génomes réalisés en France d'ici à 5 ans ».
Pauline Fréour explique dans un article paru dans Le Figaro que « ce plan se traduira par la création progressive de 12 plateformes dédiées au séquençage génomique à haut débit, technologie dont les immenses progrès permettent désormais de décoder l'ensemble des 20.000 gènes codants d'une personne en seulement quelques jours et pour moins de 1000 €. […]Le Pr Yves Lévy, président de l'Inserm, déclare qu’« avec ce plan, la France se prépare aux besoins prévus dans les années à venir, estimés à 200.000 génomes séquencés par an d'ici à 5 ans ».La journaliste précise que « l'accès élargi à la technologie sera d'abord proposé aux personnes atteintes de maladies rares, de diabète et de cancer. Les premières verront une chance de réduire la durée de pose d'un diagnostic, puisqu'elles n'auront plus à enchaîner plusieurs recherches de gènes spécifiques. Pour les autres, d'identifier le traitement le plus adapté, en évitant par exemple ceux qui leur sont toxiques ».
Le Pr Lévy ajoute qu’« à terme, d'autres maladies pourront être concernées, comme les pathologies cardiovasculaires ou l'hypertension »
Pauline Fréour note que « cette ouverture aux malades est différente de l'approche choisie par le Royaume-Uni ou les États-Unis, où le séquençage est réservé à la recherche sans qu'il y ait nécessairement de retour vers l'individu. Les données récoltées en France pourront aussi être utilisées par les chercheurs ».
La Pr Laurence Faivre, spécialisée dans les maladies rares au CHU de Dijon, réagit : « L'annonce de ce plan est une nouvelle extraordinaire. L'accès au séquençage à haut débit est un vrai problème pour les patients. Il n'est proposé que dans 2 ou 3 établissements où des équipes se sont mobilisées pour faire financer le projet par leur direction. Cela crée une inégalité importante sur le territoire ».
Pauline Fréour indique qu’« outre l'équipement des infrastructures (qui seront liées aux CHU), le projet nécessite aussi de former des professionnels (biostatisticiens, bioinformaticiens) et de réfléchir à l'enseignement des médecins, à l'université ou en formation continue ».
Le Pr Lévy « a aussi proposé de saisir le Conseil consultatif national d'éthique, qui a déjà commencé à réfléchir au sujet. […] Quelle conduite tenir par exemple, lorsque le génome d'une personne testée pour une maladie rare indique aussi un risque de
Dans La Croix, Denis Sergent évoque également ce «plan de médecine génomique pour améliorer les soins ».
Le journaliste explique que ce plan « est issu du rapport «France Médecine Génomique 2025 : permettre l’accès au diagnostic génétique sur tout le territoire» du Pr Yves Lévy, président de l’Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé et de l’Inserm, remis au premier ministre » hier.
« Il vise à analyser complètement la nature et l’ordre d’enchaînement des gènes qui composent l’ADN de chaque personne pour détecter ses anomalies géniques (mutations), dans l’objectif notamment de déterminer les risques de développer certaines maladies et les réactions face à des médicaments », poursuit Denis Sergent.
Il note que « sa mise en œuvre […] se structure autour de trois grands objectifs : profiter des progrès technologiques en matière de recherche, déployer un dispositif de génomique clinique sur tout le territoire, et enfin mettre rapidement sur pied une filière nationale de médecine génomique ».
« Ce qui nécessite d’accéder à des milliers de données numériques (le « big data ») sur la santé de la population. Les conditions d’accès à ces données et leur utilisation soulevant un certain nombre de questions éthiques, il a d’ores et déjà été prévu de saisir le comité consultatif national d’éthique », relève le journaliste.